Printemps-Été 2005
ISSN : 1280-1496
Télécharger la Lettre RDJ n°23
SOMMAIRE
Éditorial > Université et recherche
Libre propos > Recherche juridique : les attentes en matière de droits de l’homme par Sidiki Kaba
Recherches > Le statut des unions homosexuelles en Europe / Le travail pénitentiaire / La prise en charge des victimes d’accidents collectifs
Équipe > Le CESDIP
Dossier > 10 ans de recherche sur la prison
Thèse > Police et Justice face au citoyen : le repli bureaucratique par Christian Mouhanna
Notes de lecture
Actualité
Éditorial > Yann Aguila
Maître des Requêtes au Conseil d’État
Directeur de la Mission
Université et recherche
Le diagnostic est sévère. Dans le classement mondial des meilleures universités établi par l’université Jiao Tong de Shanghai, la première université française n’arrive qu’en 46ème position. Seule quatre universités françaises figurent dans les cent premières places.
Même si ce classement est surtout pertinent dans le domaine des sciences exactes, même si ses critères de jugement peuvent parfois être discutés, ne devons-nous pas nous interroger ? Car on peut en tirer un leçon qui est sans doute transposable en matière de sciences humaines : la nécessité d’un lien fort entre université et recherche. La recherche est essentielle au rayonnement de l’université. Certes, cette dernière doit répondre à une demande sociale de formation. Mais elle doit aussi conduire des activités de prospection pour élargir le champ des savoirs. Et, en sens inverse, l’université est utile à la recherche. Cette dernière est stimulée par la confrontation intellectuelle que suppose l’enseignement.
Nos facultés de droit, pour leur part, ont conservé une grande influence internationale. Nous voudrions ici saluer leur excellence et rendre hommage aux maîtres qui nous ont formé. Mais, pour maintenir ce rang, il faut rester vigilant. Dans cette perspective, comme le fait le professeur Geneviève Viney dans sa préface aux Orientations scientifiques 2006-2010 de la Mission de recherche1, il paraît indispensable d’encourager l’ouverture.
Ouverture internationale, d’abord. Le droit a aujourd’hui de nouvelles frontières. Il n’est plus possible d’aborder les grandes questions juridiques sans vision comparative. Le dossier spécial du présent numéro en offre une illustration : dans son article intitulé « Bilan et perspectives de la recherche pénitentiaire », Josefina Alvarez regrette à juste titre « qu’à l’ère de l’Europe et de la mondialisation, peu de recherches adoptent une approche comparée ».
Ouverture sur les autres disciplines, ensuite. Un seul exemple, d’actualité : la Mission lance un appel à contributions sur le thème « Le droit de la famille face à la diversité culturelle et religieuse ». Il est clair qu’un tel sujet, dont les enjeux vont de soi, gagnerait à être traité par des équipes mixtes, composées à la fois de juristes et de sociologues. On connaît pourtant les difficultés de constitution de telles équipes.
Ouverture, enfin, au sein même de la discipline juridique. La distinction entre les diverses branches du droit, nécessaire pour la structuration de l’enseignement, ne doit pas aboutir à un cloisonnement de la recherche. Les co-directions de thèses, les projets communs entre centres de recherche, ou encore le choix de sujets de thèses transversaux (exemple : droit pénal de l’urbanisme) se heurtent parfois à des pesanteurs institutionnelles.
Nombre de questions essentielles pour l’avenir de nos sociétés, dans le domaine des « droits naissants », illustrent ce besoin d’ouverture. Le droit de la santé, le droit des communications ou le droit de l’environnement exigent des comparaisons internationales, des approches pluridisciplinaires, et des études croisées sous l’angle civil, pénal, ou administratif. Nos universités doivent être présentes sur ces nouveaux terrains de la recherche juridique.